À l’occasion du lancement très attendu de CHANCE EAU SPLENDIDE, nouvelle fragrance signée CHANEL, j’ai eu le privilège exceptionnel de rencontrer en exclusivité Thomas du Pré de Saint Maur, Directeur Général des Ressources Créatives Parfums Beauté de cette prestigieuse Maison. Cette interview unique est une véritable chance, à l’image même de la philosophie qui anime CHANEL : provoquer son destin, saisir les opportunités avec audace et authenticité. À travers cette discussion passionnante, Thomas partage avec nous sa vision inspirante de la créativité, l’héritage intemporel de CHANEL et les coulisses fascinantes du choix d’Angèle comme égérie emblématique de ce nouveau chapitre olfactif. Une immersion rare dans l’univers subtil où se mêlent émotion, désir et beauté.
L’interview
LuxuryActivist (LA) : Votre parcours semble guidé depuis toujours par une profonde sensibilité à l’art, à la littérature et aux émotions esthétiques. En repensant à votre histoire personnelle, quel moment, rencontre ou « choc artistique » a eu l’influence la plus déterminante sur votre vision créative ?
Thomas du Pré de Saint Maur (TDPDSM) : Je crois que j’ai eu beaucoup de chance d’être né à une époque où l’on ne laissait pas encore les enfants devant des écrans. Mes parents étaient formidables, mais aussi un peu exigeants. Ils avaient à cœur de nous emmener en voyage, mes deux frères et moi, notamment pour visiter des musées. Ils avaient cette idée que la civilisation est ce qu’il y a de plus important pour que le monde fonctionne bien. C’est probablement cela qui m’a formé plus que tout. Au-delà même des choses que j’ai pu voir, c’était surtout l’idée de se laisser porter par ce que le monde propose, par la beauté, et de comprendre que tout cela constitue réellement la civilisation. Je pense sincèrement que, dans le monde actuel, cette notion de civilisation est l’un des derniers remparts qui nous restent. Ensuite, il y a eu des moments particuliers, comme la découverte de la Grèce, un pays que j’aime profondément. Mes parents, passionnés d’hellénisme, m’y ont amené très jeune. Être face à la beauté de l’art grec, devant une sculpture en pierre datant de 2500 ans, et ressentir une humanité semblable à la mienne, fut une expérience marquante. Ce sont ces moments, progressivement accumulés, qui m’ont réellement guidé sur ce chemin créatif.
LA : Y a-t-il une conviction particulière, née de cette expérience, que vous conservez précieusement dans votre approche chez CHANEL ?
TDPDSM : Je pense que CHANEL est la marque qui incarne le mieux l’esprit français. Cet esprit français est un idéal de civilisation avec comme idée centrale l’universalité. La France est ce pays extraordinaire qui a pensé et rédigé la Déclaration des droits de l’homme, le grand siècle français, ce siècle de l’ordre absolu. Cet ordre, que l’on retrouve notamment dans le jardin à la française, est essentiel car il laisse pour autant une liberté totale d’expression. Gabrielle Chanel admirait profondément cette période qui définit le classicisme français. Elle reste aujourd’hui une référence unique et admirable. Nietzsche disait que « l’esprit français est léger, libre et profond », une définition que je trouve particulièrement belle et très représentative de CHANEL. On pourrait m’appeler en me disant : « Thomas, c’est très classique ce que tu fais », et je répondrais sincèrement : « Merci ! » Être classique aujourd’hui est presque révolutionnaire, parce que cela signifie résister à la tyrannie des tendances.
LA : Gabrielle Chanel croyait profondément au destin tout en affirmant qu’il fallait savoir provoquer activement sa chance. Comment parvenez-vous à préserver l’équilibre délicat entre respect du passé et nécessité permanente d’innovation ?
TDPDSM : Je pense que respecter l’héritage signifie d’abord conserver ce qui est bon et abandonner ce qui ne l’est pas ou plus. Respecter CHANEL ne veut surtout pas dire adopter une posture figée ou inquiète, qui viserait uniquement à préserver coûte que coûte. Il faut observer la marque en se demandant : que devons-nous garder pour qu’elle reste vivante ? Ce qui n’est plus pertinent doit être changé sans hésitation. Gabrielle Chanel elle-même, dans une interview réalisée par Jacques Chazot trois jours avant un défilé, disait : « Si j’avais le temps, je referais tout ». Cette exigence constante de remettre en question nos créations est essentielle. Selon moi, il faut préserver l’idée plus que son expression, pour éviter de s’enfermer. Sans cette vigilance, on risque de devenir la caricature de soi-même. Je compare cela à ces personnes âgées qui continuent de s’habiller comme leurs petits-enfants, n’ayant pas réalisé le temps qui passe.
La vraie question est de savoir si nous avons de nouvelles choses à exprimer, de nouveaux points de vue à partager, puisque le monde change constamment. Aujourd’hui, il faut identifier des talents qui incarnent toujours cette notion d’équilibre, d’harmonie et de symétrie propre à CHANEL, mais sous des visages nouveaux. Cette évolution doit se faire sans crainte, car CHANEL est une marque qui inspire confiance. Nous devons incarner quelque chose de stable et rassurant, conscients que nous faisons partie d’un héritage plus vaste : celui de l’esprit français.
LA : Comment définiriez-vous votre rôle chez CHANEL ?
TDPDSM : Mon rôle consiste à créer des éléments tangibles et sensibles permettant aux consommateurs de comprendre clairement ce en quoi nous croyons profondément chez CHANEL. Je décris cela comme la narration de marque. Mon travail est de construire cette expérience, que les gens doivent pouvoir voir, toucher et ressentir. Je définis en quelque sorte une partition à partir de laquelle différents talents vont s’exprimer. Parfois, un seul talent va porter une partie du projet, comme un film, tandis que d’autres fois, nous mettons en place une véritable polyphonie, mêlant plusieurs actions telles que des événements ou des expériences en points de vente. C’est une dynamique à la fois amusante et passionnante.
LA : L’expérience est justement au cœur du lancement de CHANCE EAU SPLENDIDE, signé Olivier Polge. Comment accompagnez-vous une création sophistiquée comme celle-ci, de l’idée initiale jusqu’à son lancement officiel ?
TDPDSM : C’est très varié et organique. Chaque élément du projet suit son propre rythme : le packaging nécessite une longue phase d’industrialisation, tandis que la publicité ou les événements répondent à des délais plus courts. Souvent, les premiers gestes créatifs émergent de manière spontanée, sans qu’on puisse identifier précisément qui en est l’auteur. CHANEL a toujours ce côté mystérieux et vivant, imprévisible, totalement différent de ce que j’ai pu connaître auparavant.
LA : Traduire une émotion olfactive est une tâche complexe. Arrivez-vous toujours à exprimer précisément ce que vous ressentez ?
TDPDSM : Nous ne sommes pas toujours satisfaits, mais l’insatisfaction maîtrisée est un moteur formidable. Un produit de luxe doit être parfaitement réalisé : créatif, ambitieux, qualitatif. Mais au-delà de cela, il doit susciter une émotion puissante et personnelle. Porter CHANCE, par exemple, ce n’est pas simplement choisir une note verte, fruitée ou florale. C’est adhérer à quelque chose qui dépasse le produit lui-même. Le luxe stimule l’envie de vivre quelque chose de plus grand, éveillant des désirs profonds, qui nous poussent à l’audace et à l’exploration de l’inconnu.
LA : Pour incarner ce nouveau chapitre de CHANCE, vous avez choisi Angèle, une égérie à la fois audacieuse, contemporaine et authentique. En quoi une personnalité comme Angèle permet-elle d’amplifier ou même de réinventer le message émotionnel porté par une fragrance ?
TDPDSM : Angèle incarne parfaitement l’esprit de CHANCE parce qu’elle porte en elle une authenticité, une audace et une fraîcheur qui correspondent pleinement à ce que nous voulons exprimer. Choisir Angèle, c’était aussi une question de désir, car je voulais travailler avec elle. Je suis convaincu que, dans notre métier, il faut être entouré de personnes que l’on admire sincèrement. Angèle écrit, compose et interprète avec une énergie et une sincérité rares. Elle exprime magnifiquement cette idée de provoquer sa chance, de saisir activement les opportunités. J’avais déjà eu l’occasion de collaborer avec elle pour une campagne mascara, et je l’avais trouvée extrêmement intéressante et inspirante.
Pour CHANCE, nous voulions vraiment quelqu’un capable d’incarner ce parfum de manière individuelle et forte. Historiquement, CHANCE racontait plutôt une histoire collective, une sorte de “girls band”. Mais avec CHANCE EAU SPLENDIDE, il était nécessaire d’avoir une personnalité unique, une véritable présence. Angèle possède cette stature exceptionnelle, apportant ainsi une dimension plus profonde à notre récit. Lorsqu’elle parle de sa carrière, elle parle de sa propre détermination : elle a forcé la porte, provoqué activement sa chance. C’est exactement cette philosophie que nous souhaitions mettre en lumière à travers ce parfum. Ma grand-mère me disait souvent : “Life is not a rehearsal” (la vie n’est pas une répétition). Angèle incarne parfaitement cette idée de saisir l’instant présent, d’oser prendre des risques lorsque l’occasion se présente. C’est précisément cette énergie juvénile, pleine d’audace et de spontanéité, qui rend Angèle absolument idéale pour représenter CHANCE.
LA : À propos justement du choix d’une égérie, selon vous, quels sont les critères essentiels pour définir l’égérie idéale pour CHANEL ?
TDPDSM : Le critère essentiel est avant tout un désir réciproque sincère et profond. Il est fondamental que l’égérie ait réellement envie de collaborer avec nous, au-delà de toute considération purement transactionnelle. Il est important de sentir une véritable connexion humaine et émotionnelle, un lien authentique et fort. Cette fidélité est essentielle parce qu’elle raconte de vraies et belles histoires, qui résonnent profondément auprès de nos clientes. Vanessa Paradis, par exemple, est avec nous depuis le début des années 90, ce qui montre une belle constance et une véritable cohérence dans notre manière de représenter la beauté féminine. Lorsque je suis arrivé chez CHANEL, notamment lorsque je m’occupais de l’horlogerie-joaillerie, ma plus grande obsession était de refaire une campagne avec Ali MacGraw, qui avait incarné le N°5 dans les années 60. Je lui ai finalement fait faire une publicité pour la montre J12, 50 ans après sa première apparition pour CHANEL. Ces histoires, ces fidélités, sont à mon sens particulièrement touchantes et significatives. Elles témoignent aussi d’une véritable morale vis-à-vis de nos clientes : si nous restons fidèles à nos égéries, nous prouvons que nous sommes fidèles à notre idée de la beauté et aux femmes qui investissent beaucoup d’espoir en CHANEL. La continuité, le respect de l’histoire et des valeurs sont donc absolument fondamentaux pour définir l’égérie idéale chez CHANEL.
LA : Pour finir, que pouvons-nous vous souhaiter sincèrement pour l’avenir ?
TDPDSM : De continuer à jouer. Chez CHANEL, j’ai la chance extraordinaire de considérer mon métier comme un jeu. Un jeu responsable, raisonné, mais pas trop, toujours stimulant. Préserver cette sensation est ce que je souhaite avant tout.
Pour conclure,
Cette rencontre privilégiée avec Thomas du Pré de Saint Maur nous laisse avec une admiration sincère pour l’homme derrière la créativité exceptionnelle de CHANEL. Thomas apparaît comme un authentique visionnaire, profondément sensible à l’art et doté d’une finesse intellectuelle rare. À travers ses réponses, il nous révèle une personnalité passionnée, attentive à préserver l’équilibre subtil entre héritage et modernité. Sa compréhension aiguë des valeurs essentielles de CHANEL et sa capacité à traduire l’émotion en expériences palpables font de lui un véritable chef d’orchestre créatif dans l’univers exigeant du luxe.
Ses convictions sont claires : le luxe doit éveiller le désir, créer du sens et rester fidèle à l’authenticité. En choisissant Angèle comme égérie pour CHANCE EAU SPLENDIDE, Thomas démontre parfaitement sa capacité à capter l’esprit contemporain tout en respectant la profonde identité de la Maison. Ce lancement illustre admirablement sa philosophie selon laquelle provoquer sa chance n’est jamais une simple question de hasard, mais bien une démarche active et courageuse.
Thomas nous rappelle également que l’élégance et la fidélité à des valeurs fortes sont essentielles dans un monde trop souvent dominé par l’éphémère. À l’issue de cet entretien enrichissant, il est évident que CHANEL a fait bien plus que confier sa créativité au hasard. Alors, à notre tour désormais de saisir cette opportunité précieuse d’oser, car après tout, la plus belle des chances reste toujours celle que l’on décide de saisir.
José Amorim
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